LE TEMPS DE LA DEMERDE ….
Posté par lapecnaude le 5 janvier 2012
En ces nouveaux temps où l’on voit se profiler à l’horizon de notre avenir la disette et les jours de « vaches maigres », il vaut mieux se préparer à apprendre ou réapprendre le « système démerde » que nous pratiquions allègrement dans ma jeunesse.
« La dèche », les fins de mois difficiles, de celles où il fallait soigneusement explorer tous les tiroirs de la maison afin de trouver de quoi acheter le paquet de Celtique du père, j’ai connu cela durant presque toute mon enfance, ambiance de fin de guerre, de « réfugiés » dans son propre pays …
Très tôt, vers mes 8, 10 ans j’ai compris qu’il me fallait faire quelque chose et j’ai exploité les possibilités de mon entourage, le commerce, activité intéressante et vivante m’a attirée, je me suis créé mes jobs et ma foi les clients sont venus preque par obligation. Cà ne rapportait pas gros, mais j’arrivais à me payer mon « Tarzan » chaque semaine (double page, illustration de Burroughs ?) et mettre « à compte » chez mes employeurs de quoi acheter le tissus nécessaire pour faire la « robe du dimanche » de l’année et des foi, une paire de chaussures avec. On ne me payait pas lourd, c’était normal.
Au départ, mon travail consistait à arroser les plantes grasses de la fleuriste d’en face, la Marie-Louise, puis lorsqu’il y avait de la presse, à monter les fleurs au fil de fer sur des clous pour les piquer sur les formes en paille pressée, ce qui donnait les « coussins fleuris » du 14 juillet et autres fêtes, les enterrements aussi. Pour aller plus vite dans les arrosages, tant pis si cela piquait, je mettais les cactus dans un panier à salade et hop 10 d’un coup, moins fatiguant quoi.
Plus tard, je suis passée à l’étalage extérieur, exposer les plantes, les soigner, les vendre. Gros rapport à la Toussaint, en ai-je vendu des chrysanthèmes à grosses tête et des cynéraires bleu intense. On s’étonnait de voir rester les cyclamens roses tendre, si fragiles que c’était une misère d’aller les faire geler sur les tombes. J’argumentais, je choisissais presque pour les clients (qu’est-ce que çà peut chipoter une mémé qui ne s’occupe de la tombe familiale qu’une fois par an !), puis je les accompagnais à la caisse. Vite fait, bien fait, là j’étais « au pourcentage », 5% s’il vous plait, plus tard j’ai réclamé plus.
Avant le cimetière, il y avait les enterrements. Faut dire qu’en ces années, j’ai vu beaucoup plus de personnes agées disparaître que de jeunes, il y avait eu la précèdente et il y avait l’Indochine, alors pas souvent de jeunes, moins de voitures peut-être. Pour moi, plus le client était socialement important, plus il était intéressant. Les sentiments … je n’en avais guère à force d’entendre » ben, c’est un bon âge pour mourir », il m’était évident que quand on enterrait un ancien Maire ou un médecin retraité, la population émue l’accompagnait avec … des fleurs. J’y ai appris le cynisme en prenant les commande » avec beaucoup de vert, surtout », le coussin étant compté au nombre de fleurs, le feuillage consistant en verdure arrachée au lierre des ruines du chateau ou aux cyprès du jardin ne comptait pas, mais les clients voulaient bien compatir, mais pas pour trop cher quand même !
Pour moi, je gagnais sur deux tableaux, à monter les fleurs et les feuillages au temps passé, et aussi, là c’était plus intéressant, en effectuant le portage des produits. Je m’arrangeais pour les amener une par une au fur et à mesure de leur création et là commençait un autre boulot. Fallait avoir la manière, se frotter les yeux avant d’arriver afin d’avoir un « air de circonstance » (les yeux rougis, c’est mieux), murmurer le nom du donateur même s’il y avait une carte, histoire de dire « je suis au courant, je participe … » et ne pas oublier le pourboire à chaque fois. Certains enterrements ont été de belles affaires pour moi.
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